Toujours que les yeux pour pleurer

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Bernadette Loubier

Depuis 2011, vingt-cinq attaques de requins ont frappé La Réunion. Neuf personnes y ont trouvé la mort, cinq autres ont été mutilées dont des hommes, des femmes et des enfants. Quant au décompte depuis 1980, il est encore plus dramatique : 58 attaques mortelles ou blessés à vie. Quel triste bilan, quelle impuissance face à des squales de plus en plus agressifs envers l’homme et qui, maintenant on en est sûr, peuvent attaquer n’importe qui et dans n’importe quelles conditions!

Il ne s’agit plus de stigmatiser les surfeurs imprudents voire inconscients et de crier à la prise de risques insensés après qu’une simple baignade jusqu’à la taille, voire au haut des jambes a coûté la vie à deux jeunes filles, une adolescente et une jeune femme… ou à un pêcheur de bichiques plus récemment.

Pour ne plus risquer d’être responsables, les collectivités municipales et préfectorales ont sorti des arrêtés en cascade. Depuis le 26 juillet 2013, les activités nautiques sont interdites hors du lagon. Le préfet actuel, Amaury de Saint-Quentin, vient de signer son neuvième arrêté en début de mois.

Dénommée depuis de nombreuses années la «crise requin», cette problématique est installée et se pose chaque jour. Nous ne sommes plus en «crise». Cet état permanent s’est traduit par l’interdiction, un cas inédit sur l’ensemble d’un littoral, et l’absence d’une gestion collective. Ce que déplorent les scientifiques, les passionnés, les familles et les touristes… qui boudent nos côtes pour se concentrer sur celles des îles voisines. La Réunion a maintenant du mal à se défaire de cette image d’île aux requins.

Alors que faire? De nouvelles études qui évitent de se perdre en certitudes? Le déploiement de nouveaux filets? De plus de vigies? De dispositifs individuels de répulsion? De sentinelles de terre? D’un mélange de toutes ces protections? Pourquoi pas mais le risque 0 n’existera jamais.

Les surfeurs et aficionados de l’océan nagent entre frustration et colère. Beaucoup se sentent délaissés par l’Etat et par les collectivités en général. Les professionnels du tourisme tentent eux de se rassurer et d’espérer des solutions pour protéger et sécuriser grâce à un travail collaboratif et mieux structuré. Ils sont unanimes et dénoncent le manque de courage politique.

Alors en cette huitième année qui enregistre déjà un mort, La Réunion n’a toujours que les yeux pour pleurer. Chacun continue pourtant à y aller de sa proposition, pas toujours avec beaucoup de conviction. Chacun souhaite trouver une solution pour que la presse n’ébruite plus de mauvaises nouvelles.

Et si, la raison était la plus forte. Les attaques de requin ont toujours existé à La Réunion. Quel niveau de risque considère-t-on comme acceptable? Et comment l’appréhende-t-on? Sans gestion collective, rien est possible.

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